février 26, 2021

Achats controversés d’équipements médicaux : Deepak Bonomally effleure les avances de la STC

Par andy1712


Deepak Bonomally, le directeur de Bo-Digital qui est retourné à la barre des témoins, le jeudi 25 février 2021 s’est attiré les foudres de Me Azam Neerooa, le représentant du Directeur des poursuites publiques (DPP).

Sa compagnie Bo-Digital a obtenu des contrats pour plus de Rs 300 M pour l’achat d’équipements médicaux. C’était durant la période de couvre-feu sanitaire en raison de la propagation de la Covid-19 à Maurice. Or, Deepak Bonomally a affirmé, à la barre des témoins, le jeudi 25 février 2021, ne pas se souvenir du prix d’achat des équipements en question. C’était devant le tribunal de Moka dans le cadre de l’enquête judiciaire sur la mort de l’ex-agent politique Soopramanien Kistnen.

Deepak Bonomally a été interrogé par Me Roshi Bhadain, avocat de Komadha Sawmynaden, sur la provenance de l’argent pour acheter les équipements médicaux (masques et lunettes médicaux et Personal Protective Equipment (PPE), entre autres) durant le couvre-feu sanitaire. Il a confirmé avoir obtenu « enn lavans » de la State Trading Corporation. Cela bien qu’il n’ait pu se souvenir du montant de ces « avances ». Il a indiqué que, dans certains cas, c’était des « avances » de 100 %, dans d’autres de 50 % et 70 %.

Selon Me Roshi Bhadain, Bo-Digital a décroché six contrats pour l’achat de matériel médical, du 3 avril au 25 juin 2020, pour des montants de Rs 142,5 M, Rs 129 M, Rs 30,3 M, Rs 6 M, et deux contrats de Rs 600 000 chacun. Il s’agissait de contrats sous le label « Emergency Procurement ».  S’agissant d’un contrat alloué à AV Techno-World de Vinay Appanna pour un montant de Rs 77 millions, Deepak Bonomally a répondu: « Bann zafer Covid sa mo pas kone ».

Me Neerooa qualifie de Bonomally de « blatant liar… »

«He is a blatant liar ». C’est en ces termes que le représentant du DPP, Me Azam Neerooa, a qualifié Deepak Bonomally. L’avocat a invité la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnauth à sanctionner Deepak Bonomally pour « faux témoignage ».

Le témoin a avoué, jeudi, avoir menti précédemment sur son lieu de résidence. Il a, dans un premier temps, refusé de divulguer son adresse, avant de se raviser et de déclarer avoir changé d’adresse pour des raisons de sécurité. Selon Me Neerooa, le directeur de Bo-Digital a « une nouvelle fois menti sur son adresse réelle et sur le mois durant lequel il a ouvert son bureau de la rue Cossigny, à Quatre-Bornes ».  Me Neerooa s’est ensuite référé à l’article 126 de la District and Intermediate Courts (Criminal Jurisdiction) Act.  Il y est stipulé : « Any person who, when heard as a witness in any such case or inquiry, gives false evidence, shall commit an offence and shall be liable on conviction to imprisonment for a term not exceeding two years ».

L’avocat de Deepak Bonomally, Ganessen Mooneesawmy, a plaidé que son client souffre de « dépression réactionnelle et est sous médicaments ». Il dit détenir deux certificats médicaux. L’avocat a été sommé de les présenter ce vendredi 26 février. La cour fera connaître sa décision sur la motion de Me Neerooa, le lundi 1er mars 2021, après avoir parcouru les procès-verbaux de la séance de ce jeudi.  L’audition de Deepak Bonomally a été renvoyée. Par ailleurs, Vinay Appanna est attendu à la barre le lundi 1er mars 2021.

Le projet Safe City en attente

Le DCP Krishna Jhugroo a été appelé à la barre ce jeudi. Il a expliqué qu’il est le Chairman du projet de vidéosurveillance Safe City. Safe City Mauritius, a-t-il dit, n’inclut pas de sauvegarde Cloud. Le système a été conçu pour sauvegarder les images prises au moyen des 4 000 caméras pendant 30 jours. Puis, les données « sont effacées pour toujours ». Les images peuvent être toutefois sauvegardées durant ces 30 jours sur un disque dur.

Selon le DCP Jhugroo, 3 270 caméras ont été installées à ce jour et 780 d’entre elles sont opérationnelles. Le témoin a affirmé que la police travaille sur le système de sauvegarde qui sera abrité à la Police Communication Room en cas de crash.

À une question de Me Rouben Mooroongapillay, pour savoir si la police a eu recours à la reconnaissance faciale pour traquer les mouvements de Soopramanien Kistnen, le policier a répondu :

« Ce composant n’est pas disponible pour l’heure, mais Mauritius Telecom y travaille pour l’implémenter avant la fin du projet ».

Interrogé par Me Bhadain sur la possibilité de recréer les images effacées du serveur central, le haut gradé a révélé que la police ne dispose pas de ce genre d’expertise. Il a été invité par l’avocat à s’adresser au fournisseur Huawei pour voir si c’est possible.


De footballeur à Marketing Manager

Deepak Bonomally a expliqué son parcours. L’ex-joueur de la Fire Brigade dira qu’il a été journaliste sportif 1991 à 2011. « C’est pour prendre un nouveau départ » qu’il dit avoir abandonné le journalisme. Il rejoindra Century Advertising et rencontrera de Vinay Appanna par l’entremise d’un nommé de Basant Lallah. Il occupe alors le poste de Marketing Manager. Sa tâche consiste, selon ses dires, à dénicher des clients. Il cumulera le rôle de Marketing Manager pour une compagnie de Vinay Appanna (Rental Express). Cela jusqu’à février 2020 où il décide de se concentrer sur ses propres affaires. Il dit avoir fait incorporer sa compagnie Bo-Digital en 2016.

Le droit de ne pas s’auto-incriminer évoqué

Le tribunal de Moka a autorisé Deepak Bonomally à ne pas répondre, pour l’instant, à une seule question de Me Roshi Bhadain. Celui-ci voulait savoir s’il « a déjà payé » Vinay Appanna. Me Ganessen Mooneesawmy est intervenu pour dire que son client est provisoirement accusé de blanchiment d’argent par l’Independent Commission Against Corruption (Icac). Il a ajouté qu’il a été notamment question avec les limiers de l’Icac, de transferts d’argent entre Av Techno-World de Vinay Appanna et Bo-Digital et de « la marge de profit de 30 % » perçue sur un des contrats pour l’achat d’équipements médicaux de Bo-Digital Ltd durant le confinement.  L’avocat s’est appesanti sur le droit au silence dont bénéficie son client. La magistrate Mungroo-Jugurnauth a expliqué que Deepak Bonomally a le droit de ne pas répondre s’il pense qu’il va s’auto-incriminer en ce faisant. Néanmoins, la cour a accédé à la requête de Me Bhadain d’avoir une copie de l’acte d’accusation provisoire retenue contre Deepak Bonomally devant le tribunal de Rose-Hill.  Cela après son arrestation par l’Icac, le 3 novembre 2020.

Prise de bec entre avocats

La séance a été marquée par un échange entre Mes Bhadain et Mooneesawmy. Le premier s’est plaint que le second l’ait interrompu à plusieurs reprises durant l’interrogatoire de Deepak Bonomally. La magistrate a averti Me Mooneesawmy de s’abstenir d’interrompre à tout bout de champ son confrère au cours de l’audience.