avril 7, 2021

Uber, Deliveroo… Pourquoi la grande distribution s’associe aux plateformes de livraisons

Par andy1712


Carrefour et Casino ont annoncé un renforcement de leurs partenariats avec Uber Eats et Deliveroo pour la livraison de courses. Un pari risqué en terme d’image et de rentabilité.

Carrefour qui s’associe avec Deliveroo un an après avoir signé avec Uber Eats. Casino qui annonce un partenariat avec Uber Eats après celui déjà mis en place… avec Deliveroo. Les deux plus importantes enseignes intégrées de grande distribution se suivent de près.

Ainsi, d’ici l’automne prochain, les utilisateurs de l’application Uber Eats qui se font livrer leurs repas pourront aussi faire leurs courses dans les enseignes du groupe Casino en plus de celles de Carrefour.

Pour Casino, ce sont 190 agglomérations qui seront concernées à la rentrée prochaine. Testé depuis fin mars à Montpellier, le dispositif a été étendu dans 17 grandes villes le 3 avril dont le 13ème arrondissement de Paris, Marseille, Toulouse ou Saint-Etienne. Il prévoit la livraison de deux types de paniers, l’un de fruits et légumes “100% producteurs français”, l’autre de produits “indispensables” avec notamment du riz, des pâtes ou encore du chocolat.

Plusieurs enseignes sont concernées, avec Franprix, Monop’, La Nouvelle Cave et le Drugstore Parisien (proposant près de 1000 références produits du quotidien et 360 références de produits de beauté). Puis rapidement, dans un deuxième temps, il sera étendu à d’autres enseignes du groupe Casino et dans de nouvelles agglomérations françaises”, précise le groupe Casino dans un communiqué.

Côté Carrefour, ce service est proposé sur Uber Eats depuis le premier confinement de 2020. Les utilisateurs franciliens de la start-up américaine peuvent commander une centaine de références des magasins du distributeur. Et d’ici quelques jours, ce sont les utilisateurs de Deliveroo qui pourront commander des produits Carrefour pour se faire livrer des courses en moins de 30 minutes. D’abord à Paris, ce service sera étendu à une dizaine d’autres grandes villes françaises dans les prochains mois.

Une rentabilité réduite

Alors que le e-commerce alimentaire est en plein essor avec des pics de part de marché à près de 10% des ventes en 2020, les enseignes françaises ont donc décidé de mettre tous leurs fers au feu: drive, drive piéton, livraison en direct, partenariats avec les services de livraison… L’idée pour elles est de proposer le plus de services différents à leurs clients.

Car si en 2020, le e-commerce alimentaire a bondi de 60% en Europe selon une étude McKinsey/EuroCommerce, les habitudes prises devraient perdurer. Selon cette même étude, 25% des consommateurs comptent augmenter leurs achats en ligne une fois la crise passée. Et alors que les consommateurs ont massivement utilisé les plateformes de livraisons de repas avec la fermeture des restaurants, la grande distribution veut aller les chercher sur ses applications.

Ce qui n’est pas sans risque. D’abord en terme d’image. En proposant leurs services via ses plateformes, elles risquent de perdre la maîtrise de leur marketing et de proposer une offre interchangable. D’autant que ces plateformes ne jouissent pas toujours d’une image très positive comme en témoigne la difficile introduction en Bourse de Deliveroo en mars. C’est ce qu’estime Michel-Edouard Leclerc.

Quand Carrefour va sur Deliveroo ou Monoprix va sur Google, le risque c’est qu’ils se “googlisent” ou se “deliverisent, estime le patron des centres Leclerc sur BFM Business. Notre challenge à nous c’est d’être moderne en restant Leclerc, faire du digital en restant local.”

L’autre enjeu concerne évidemment la rentabilité. Les enseignes n’ont toujours pas trouvé la martingale pour livrer des courses à domicile sans rogner leurs marges. Selon McKinsey, la rentabilité moyenne du e-commerce se situe entre 1,5 et 5% en Europe contre 5 à 7% pour la vente en magasin.

Améliorer la rentabilité du e-commerce sera un des enjeux du commerce alimentaire post-Covid, assure dans LSA Franck Laizet, directeur associé chez McKinsey. Les coûts de la préparation de commande et de la livraison restent supérieurs aux coûts des magasins physiques. Les distributeurs doivent donc continuer à optimiser le modèle commercial, développer le drive et le drive piéton et jouer la complémentarité entre des entrepôts de périphérie productifs mais peu flexibles et une micro-logistique automatisée de centre-ville plus agile.”

En sous-traitant la livraison aux plateformes de livraison, les enseignes s’épargnent le coût de la livraison mais au prix d’une commission très élevée qui varie de 15 à 25%. Mais le but des enseignes est de jouer sur les volumes (Uber Eats compte 9 millions d’utilisateurs) et de toucher un public urbain plus jeune.

Le partenariat avec Deliveroo nous donne accès à un service national sans avoir à investir dans notre infrastructure ou des achats de trafic, explique dans LSA Olivier Rego, le directeur de l’enseigne Monop’. Avec 102 magasins, nous n’avons pas la taille critique pour le faire en direct, d’autant que les clients limitent les téléchargements d’applications sur leur smartphone”.

Frédéric Bianchi